Moshe Cukierman et ses compagnons, de jeunes cyclistes juifs polonais, s'entraînaient dans les clubs sportifs juifs Bar Kochba et Maccabi Lodz et participèrent à de nombreuses compétitions tout au long des années 1920 et 1930. Une vaste collection de médailles, de coupures de presse, de journaux de voyage et de photographies, qui ont été donnés à Yad Vashem et intégrés à sa collection d'objets, témoigne de l'importance des activités sportives de Cukierman et de ses amis avant la Seconde Guerre mondiale.
Capitaine de l'équipe cycliste de l'association Bar Kochba de Lodz, Cukierman était aussi à la tête de l'association cycliste de la ville et servait d'arbitre dans des compétitions cyclistes partout en Pologne. Il participa à des compétitions cyclistes longue distance, remporta de nombreuses médailles et relata ses périples cyclistes dans des journaux de voyage.
L'une des compétitions auxquelles il participa eut lieu dans le district polonais de Kielce le long d'un itinéraire de 500 km traversant différentes villes. Comme le voulait l'usage dans les compétitions cyclistes au début du vingtième siècle, Cukierman devait faire tamponner son carnet de bord par un représentant de chaque localité définie comme point de passage obligatoire afin de prouver qu'il avait bien suivi l'itinéraire requis. Dans ses journaux de voyage figurent les tampons et les signatures des autorités de police et des représentants des communautés juives, ainsi que des anecdotes au sujet de ses rencontres avec des membres d'autres clubs sportifs juifs et des représentants d'organisations sionistes.
En 1934, Moshe Cukierman épousa Tova Krakowski, une gymnaste de Lodz. En 1935, le couple se rendit en Eretz Israel (Palestine mandataire) pour participer aux Maccabiades et décida d'y rester et de ne pas retourner en Pologne.
La plupart des membres de leurs familles demeurés en Pologne furent assassinés pendant la Shoah.
Extraits d'un journal de voyage de Moshe Cukierman :
« Il pleut de plus en plus, la route est couverte de boue. J'ai passé la ville de Mnichow [?], il est déjà 7 heures du soir et il me reste plus de 20 km à parcourir jusqu'à Kielce. C'est un vrai déluge, on entend le tonnerre, il fait sombre, la route est boueuse, c'est très difficile d'avancer. »
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« Dans les montées, je suis contraint de descendre de vélo et de marcher et dans les descentes, je suis emporté par la vitesse et aspergé de boue et d'eau par les roues. C'est très dur, très difficile à supporter. Je suis arrivé trempé jusqu'aux os et dans le froid à Kielce à 8 heures et demie du soir. »
« Encore 100 km à parcourir jusqu'à Lodz, dommage ! Vraiment dommage ! Cela me désole mais je suis très satisfait de cette course en particulier et de ce voyage en général, car c'est ainsi qu'on apprend comment affronter les aléas de la nature et les difficultés de la route, comment se comporter dans des villes étrangères et avec des inconnus. Je conclus le récit de tous ces souvenirs et de tout ce que j'ai vécu en criant : Hourra ! Longue vie au tourisme ! 26 août 1928 »
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« Avant la ville d'Ostrowiec, la route est accidentée, elle est en pierre, comme les routes polonaises d'autrefois et dans la pénombre, je n'ai pas réalisé que je me trouvais sur la pente escarpée d'une grande colline. J'ai roulé jusqu'en bas à une vitesse phénoménale et il aurait été trop dangereux de sauter de mon vélo. J'ai tout fait pour essayer de m'arrêter mais en vain. J'ai découvert ensuite que c'était une descente longue de 4 km. Tous ces arrêts et ces secousses m'ont épuisé, j'ai finalement senti que je roulais de nouveau à plat et je suis arrivé à Ostrowiec à 9 heures et demie. Depuis mon départ de Kielce à 3 heures et demie, j'ai parcouru 122 km. À Ostrowiec, je me suis immédiatement tourné vers l'association sportive "Hakoach". Je connaissais les membres du comité. Ils m'ont accueilli très chaleureusement et invité à dîner et à rester passer la nuit. »
Collection d'objets de Yad Vashem
Don de la famille Tsur, Israël