Bien que Max Wolkowicz soit le premier de la famille à avoir été déporté à Auschwitz, il survivra à la Shoah grâce à sa formation de plombier. Il est rattaché à des groupes de travailleurs qualifiés, qui se déplacent d'un camp à l'autre et bénéficient de conditions de vie un peu plus favorables du fait de leur statut professionnel.
Durant son emprisonnement à Auschwitz, Max ignore ce qu'il est advenu de son épouse et de son fils bien aimés. Il ne découvrira l'amère vérité qu'après la guerre. Lorsqu'il rentre chez lui à Paris, la concierge lui remet une lettre que Pierre lui a écrite et envoyée du camp de Pithiviers le 13 août 1942, après le départ de Berthe. Il décrit dans cette dernière lettre les terribles conditions de vie du camp et l'implore de lui envoyer de la nourriture et des vêtements.
Ces derniers mots déchirants, ainsi que le violon de Pierre demeuré, intact, dans la maison familiale, seront les seuls vestiges de son fils bien aimé.
La dernière lettre de Pierre Wolkowicz :
Transcription de la lettre à l'identique
Pithiviers le 13 Août 1942
Chère Madame Capoulade
Je suis toujours au camp de Pithiviers. Ma mère qui était au camp avec moi, est partie il y a quelques jours, on ne sait pas où. La vie est terrible.
Depuis le "Vél d'Hiver" où nous sommes restés 5 jours sans manger et presque sans air, on nous a enfermés à Pithiviers. Il y a eu plusieurs départs, on ne sai [sic] toujours pas où. Pour l'instant je crève de faim, nous couchons sur la paille, et les poux et les puces nous dévorent.
Nous avons le droit de recevoir des colis. Je suis tout seul et sans aide dans le camp. Je vous en prie, chère madame, envoyez-moi un colis avec de la nourriture (surtout du pain ou des biscottes, etc…).
Je vous ait [sic] envoyer [sic] une somme de 4.500 par l'intermédiaire d'une infirmière ; cette somme n'est pas à moi ! Il faut que vous gardiez cette somme en réserve, intacte, sans y toucher ! Avant de partir nous sommes fouillés et déshabillés par les Allemands, et nous ne pouvons rien passer du tout, pas même un couteau et une cuillère ! Ne m'envoyez pas de lettres, car je ne les recevrai pas. (Surtout envoyez moi le plus rapidement possible un colis) car je crains que d'ici quelques jours je partirai. On nous a tous rasés et tondus, et nous menons une vie terrible.
Je pense que vous allez bien ainsi que toute la famille. Chère madame c'est en pleurant que je pense à vous et vous écris ; alors c'est entendu ! J'ai une grande confiance à vous, car il ne me reste plus personne que vous ! Gardez l'argent précieusement et intact – (envoyez-moi un colis le plus vite possible) car je crève de faim ! Ma pauvre maman ne me reconnaissait presque plus tellement j'ai maigri.
Envoyez-moi dans le colis les vêtements suivants :
- Dans l'armoire de la chambre à coucher vous trouverez une paire de pantalons longs de couleur très claire, ce sont des pantalons de tennis, les plus clairs de l'armoire - mettez-les dans le colis.
- 5 grands mouchoirs, que vous trouverez, ou dans le buffet de la salle à manger, ou en train de sécher, ou dans l'appartement, et 1 paire de serviettes éponges (au même endroit)
- Toutes les chaussettes que vous trouverez, dans le logement et dans le tiroir de l'armoire de la chambre à coucher.
Vous m'enverrez ce colis, recommandé, et seulement lorsque vous recevez ma carte postale où il y aura marqué : « Je suis en bonne santé »
C’est-à-dire : vous préparez le colis "recommandé" et dès que vous recevez une carte postale où il y aura marqué « Je suis en bonne santé » vous envoyez immédiatement le colis à cette adresse :
Wolkowicz Pierre
Camp de Pithiviers (Loiret)
Baraque 7 matr : 17
Si jamais je parts [sic] autre-parts [sic], je vous en ferais part dès que je le pourrais. Je vous embrasse très fort, chère madame, ainsi que votre mari et vos enfants.
En pensant toujours à vous,
Pierre.
P.S. Je vous supplie, de ne dire à personne que vous avez reçu l'argent et la lettre, de le garder secret.
Pierre