« Pendant toutes ces années, depuis notre immigration en Israël, nous avons maintenu le contact avec Refik. [..] Des contacts épistoliers des deux côtés. Pourtant à la fin des années 80, j'ai pensé : pourquoi ai-je attendu jusqu'à aujourd'hui, […] je n'ai pas songé à proposer Refik pour être reconnu Juste parmi les Nations. En 87, je me suis adressé à Yad Vashem, à Yad Vashem ils ont entamé des recherches, ont examiné le dossier et ont finit par lui délivrer ainsi qu'à ses parents le titre de Justes parmi les Nations sur la base du témoignage que je leur avais transmis, et des témoignages recueillis. En 88, suite à l'obtention du titre de Juste Parmi les Nations on n'aurait jamais pu imaginer qu'il puisse venir et recevoir le diplôme en main propre. J'ai entrepris une correspondance avec le président albanais Ramiz Alia […] J'ai tenté de lui expliquer ce qu'était un Juste parmi les Nations, j'ai tenté de lui expliquer ce que Refik avait fait. […] l'Albanie n'entretenait de relations avec aucun autre état dans le monde, […] J'ai écrit qu'il ne s'agissait pas uniquement de l'action de Refik, qu'il s'agissait de l'oeuvre de tout le peuple albanais, et qu'il y avait bien d'autres personnes comme Refik. Je lui ai écrit que Refik incarnait tous ces autres Albanais qui avaient sauvé des familles juives. S'il était invité à recevoir le diplôme, recevoir l'honneur qu'il mérite, l'Albanie recevrait également par l'intermédiaire de Refik l'honneur qui lui est dû. […]
En 1990, mes deux enfants se sont mariés, dans le même mois, en août 1990, mon fils et ma fille, et là je me suis adressé à Ramiz Alia. "Si vous pensez lui accorder un jour la permission, faites-le maintenant pour qu'il soit notre invité d'honneur au mariage de mes enfants et pour recevoir également le diplôme de Yad Vashem". Puis Refik a été convoqué au bureau de Ramiz Alia et on lui a délivré le passeport albanais, il a dit : "personne n'avait jamais vu auparavant à quoi ressemble un passeport albanais, parce qu'une telle chose n'a jamais existé, seuls les diplomates en détiennent un". […]
Bref, Refik a obtenu un permis, en 1990, il est venu, et ici on a procédé à la cérémonie de la remise de la médaille des Justes parmi les Nations. Il a vraiment eu droit à tous les honneurs, il a été reçu en grande pompe, il est retourné en Albanie comme une vedette, on a parlé de lui dans les journaux, à la télévision, et quand il était ici, beaucoup de survivants qui avaient été sauvés par des Albanais ont essayé par son intermédiaire de retrouver les traces de leurs sauveurs, personne n'avait gardé le contact avec son sauveur comme moi je l'avais fait avec Refik pendant 50 ans. […] il a réussi à localiser quelques-uns des sauveurs albanais et des contacts se sont noués entre les sauveurs albanais et les juifs qui avaient été sauvés. »
