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Thierry De Win est professeur et coordinateur au Collège du Sacré-Cœur.
Le temps de la Seconde Guerre Mondiale et des horreurs de la Shoah peut sembler lointain pour les jeunes générations, mais ce sont pourtant les leçons de cette histoirelà qui se trouvent être au cœur de la construction européenne et d’une conception renouvelée et vigilante de l’humanisme. Ainsi le travail de mémoire s’impose-t-il et reste-t-il pertinent dans un monde complexe, soumis à des violences multiples et imprévisibles, qui sombre malheureusement et si souvent dans les dérives nationalistes, racistes, xénophobes, antisémites. Témoins des témoins, convaincus de la nécessité de transmettre aux jeunes le sens des valeurs démocratiques et soutenus par leur Direction, quelques professeurs de l’Athénée Royal de Ganshoren et du Collège du Sacré-Cœur de Ganshoren (commune de Bruxelles en Belgique) ont organisé dans le courant des mois de janvier et de février derniers des activités (visites, témoignages, exposition, projection, …) concernant la Shoah et destinées à toucher les élèves dans leur questionnement citoyen et la construction de leur identité européenne. Les travaux des élèves réalisés dans le cadre de ces activités et des cours seront présentés à La Villa (centre culturel de Ganshoren) dans le cadre d’une exposition en inter réseau (un projet citoyen est aussi un projet qui rassemble) qui se tiendra du 4 mai (vernissage) au 11 mai 2011. Les autorités communales ainsi que celles de La Villa convient tous les habitants et toutes les écoles de la localité à venir la visiter, les jeunes comme les moins jeunes, afin d’associer leurs propres préoccupations à celles des élèves et des professeurs impliqués dans ce projet !
Mais comment ce projet est-il né ? Grâce au séminaire de Yad Vashem auquel participèrent, parmi d’autres enseignants réunis par la Fondation Merci au courant du mois de juillet 2010, le préfet de l’Athénée de Ganshoren et le coordinateur pédagogique de Collège du Sacré-Cœur. Une rencontre qui permit, chose encore trop rare en Belgique, d’unir des acteurs provenant de réseaux d’enseignement différent pour poursuivre ensemble un travail de mémoire et de transmission.
Yad Vashem nous a appris les vertus de l’interdisciplinarité, de la créativité et du lien. Il nous a appris aussi à nous méfier du morbide et de la seule émotion au profit du vivant et de l’analyse. Forts de cet enseignement, nous avons construit des activités interdisciplnaires autour des cours de français, d’histoire, de géographie, d’arts plastiques, de morale et de religion. Des travaux de diverses natures ont été ainsi réalisés progressivement : Par exemple, des textes, des dessins, des photographies, des panneaux explicatifs, un court-métrage, de la musique et une petite pièce de théâtre. Rassemblés sous le thème et fil conducteur de « la valise » (quoi de plus parlant en effet que cet objet susceptible de contenir une vie en résumé, objet par essence mobile et commun, figure de tous les voyages, des meilleurs comme des pires !...), tous ces travaux réalisés par les élèves des deux dernières années du secondaire seront, comme déjà précisé, installés et présentés dans le cadre d’une exposition. Fruits d’une réflexion sur la Shoah, ces travaux ont aussi été nourris par des lectures (Le dernier des Justes d’André Schwartz-Bart notamment), une autre exposition portant sur Primo Levi celle-là et fournie par la Fondation Auschwitz et par la visite de lieux de mémoire (le fort de Breendonck en particulier). Au cours de français, des informations plus soutenues ont été diffusées et interrogées, tantôt sur la littérature concentrationnaire, tantôt sur la réalité de l’extermination des Juifs. A cet égard, les quinze questions posées à Yad Vashem et alimentées par les réactions et avis de personnes autorisées (dans la salle des ordinateurs) ont été également traitées et mises en perspective.
Un projet citoyen comme celui-là est forcément fondé sur la reconnaissance de l’altérité de l’autre et sur la nécessité de respecter la dignité de son visage, d’en honorer toute l’humanité. Si nous ne pouvons changer le passé, nous pouvons en revanche contribuer à construire l’avenir : se mettre en projet consiste alors à participer activement à la construction de demain, avec le sens de ce respect et celui de la mémoire ! Contre tous les révisionnismes et négationnismes, nous nous posons avec les jeunes en personnes vigilantes et soucieuses. Puisse notre interrogation quant à savoir quoi mettre à présent dans les valises de l’exposition, des étoiles, des cendres, des pierres, des objets familiers, des lettres, des photographies…, porter haut ce message : que « le sommeil de la raison engendre des monstres » (Goya).
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