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L'accession des nazis au pouvoir en Allemagne
La démocratie de la République de Weimar a, selon eux, été imposé de force à l'Allemagne et ne convient pas à la nature du peuple allemand et à son mode de vie. Ils interprètent les termes du Traité de paix de Versailles et plus particulièrement les clauses prévoyant le versement d'indemnités exorbitantes comme une vengeance de la part des vainqueurs et une injustice flagrante. Ce sentiment de frustration, associé à une résistance intransigeante et aux mises en garde face à la menace croissante du communisme, crée un terreau fertile pour la montée en puissance en Allemagne de groupes radicaux d'extrême droite qui engendreront des mouvements comme le parti nazi.
En 1925, une reprise économique provisoire et un dialogue politique prometteur rétablissent un calme relatif. Mais l'ampleur de la crise économique internationale de 1929 propulse l'instabilité vers de nouveaux sommets.
En 1919, un soldat démobilisé du nom d'Adolf Hitler, qui a été blessé pendant la Première Guerre mondiale, rejoint un groupuscule insignifiant baptisé Parti national-socialiste. Il prend la tête du mouvement et formule les principes raciaux et antisémites de sa charte. En 1923, des activistes du parti déclenchent une révolte et essaient de prendre le pouvoir à Munich mais leur tentative échoue. Hitler est arrêté et profite de son incarcération pour écrire un ouvrage plein de fiel intitulé Mein Kampf (Mon combat), dans lequel il formule ses idées sur la théorie raciale et la domination nazie sur le monde. Hitler comprend que pour conquérir le pouvoir, il lui faut recourir à des moyens légitimes et démocratiques. Hitler et ses partisans ne laissent cependant planer aucun doute sur leur vision de la liberté démocratique qui ne représente à leurs yeux qu'un moyen d'accéder au pouvoir. Après sa libération, Hitler réorganise le parti.
Lors des élections au Reichstag (Parlement allemand) en 1924, le parti nazi obtient trois pour cent des suffrages exprimés, ce qui lui permet de faire entrer quatorze de ses représentants au Parlement. Lors des élections de 1928, le parti perd du terrain et ne remporte que douze sièges. En 1930, les premières élections postérieures à la grande crise économique marquent un tournant décisif. Les nazis créent la surprise en obtenant 18,3 pour cent des voix et 107 des sièges à pourvoir. En juillet 1932, ils deviennent avec 230 mandats, la plus grande faction représentée à la Chambre – leur mouvement politique, qui a accédé au pouvoir en toute légalité, est désormais influent. Le président Paul von Hindenburg charge Hitler de former un gouvernement et celui-ci devient chancelier le 30 janvier 1933.
Les débuts de la persécution des Juifs en Allemagne
Dans les années trente, les Juifs d'Allemagne – quelques 500 000 âmes – représentent moins d'un pour cent (0,8%) de la population allemande. La majorité d'entre eux se considèrent comme profondément patriotes et sont intimement liés au mode de vie allemand par la langue et la culture. Ils excellent dans le domaine des sciences, de la littérature, des arts et des affaires. 24% des lauréats de prix Nobel allemands sont juifs. Cependant, les conversions, les mariages mixtes et le déclin de la natalité conduisent certains à croire que la vie juive est vouée à disparaître complètement du paysage allemand.
L'idéologie nazie provient paradoxalement de l'Allemagne et du peuple allemand au sein duquel les Juifs désirent éperdument être intégrés. En effet, la croyance dans l'illusion selon laquelle leur rôle dans l'industrie et le commerce ainsi que leur contribution à l'économie allemande empêcheront les Allemands de les exclure totalement est répandue chez de nombreux Juifs.
La politique anti-juive nazie comporte deux volets principaux : l'adoption de mesures juridiques destinées à bannir les Juifs de la société et à les dépouiller de leurs droits et de leurs biens et les campagnes d'incitation à la haine, les exactions, la terreur et la violence dans des proportions variables. Un seul objectif : faire en sorte que les Juifs quittent l'Allemagne.
Le 9 mars 1933, quelques semaines après la prise de pouvoir par Hitler, des attaques organisées contre les Juifs éclatent dans toute l'Allemagne. Quinze jours plus tard, le camp de concentration de Dachau ouvre ses portes à proximité de Munich. Dachau devient un lieu d'internement pour les communistes, les socialistes, les libéraux allemands et tout individu considéré comme ennemi du Reich. Il devient un modèle pour le réseau de camps de concentration que les nazis mettront en place par la suite. En l'espace de quelques mois, la démocratie disparaît du paysage politique allemand et le pays devient un état policier centralisé avec un parti unique.
Le 1er avril 1933, un boycott général est décrété contre les Juifs allemands et des vigiles de la SA sont postés devant les boutiques et entreprises juives afin d'en empêcher l'accès aux clients.
Une semaine plus tard environ, une loi relative à la réhabilitation du service civil professionnel est adoptée. Son objectif est de purger la fonction publique des fonctionnaires d'origine juive ou considérés comme déloyaux envers le régime. C'est la première loi raciale qui tente d'isoler les Juifs et de les évincer de la vie allemande. Les lois suivantes bannissent les Juifs de la fonction publique, de l'appareil judiciaire, de la médecine publique et de l'armée allemande (alors en cours de réorganisation). Des cérémonies publiques d'autodafés ont lieu dans toute l'Allemagne. De nombreux ouvrages sont brûlés uniquement parce que leurs auteurs sont juifs. L'exclusion des Juifs de la vie culturelle allemande devient de plus en plus flagrante, réduisant à néant l'apport considérable de ces derniers dans les domaines de la presse, de la littérature, du théâtre et de la musique allemands.
En septembre 1935, les lois de Nuremberg sont adoptées, dépouillant les Juifs de leur citoyenneté et prohibant les mariages entre Juifs et non-Juifs. Les Juifs sont chassés des universités ; les comédiens juifs renvoyés des théâtres ; les œuvres d'écrivains juifs rejetées par les éditeurs et les journalistes juifs peinent à trouver des journaux acceptant de publier leurs écrits. Des artistes célèbres et des scientifiques renommés participent activement à cette campagne d'expropriation et de mise à l'index, initiée par le parti, dans le domaine de la littérature, des arts et des sciences. Certains scientifiques et médecins prennent part à l'élaboration des fondements théoriques de la doctrine raciale.