Le 2 mai 2018, dans le cadre des événements organisés en amont du Grand départ du Giro d'Italie, Yad Vashem a accueilli les participants de l'Académie cycliste israélienne et la direction du Tour d'Italie. Motif : un événement posthume pour décerner la citoyenneté israélienne à titre commémoratif au champion cycliste Gino Bartali.
Les cyclistes du Giro d'Italie ont ainsi pris part à une course commémorative sur le campus de Yad Vashem, qui s’est achevée dans le jardin des Justes parmi les Nations. Après le trajet, une courte cérémonie a été organisée pour conférer la citoyenneté israélienne à titre commémoratif, au regretté Bartali.
Le président de Yad Vashem, Avner Shalev, a remis le certificat de citoyenneté à Gioia Bartali, petite-fille du champion, en présence de l'ambassadeur d’Italie en Israël, son Excellence M. Gianluigi Benedetti et du président d'honneur du Grand Départ du Giro, Sylvan Adams. Un événement organisé par la responsable du département des Justes parmi les Nations de Yad Vashem, Irena Steinfeldt.
En 2013, Yad Vashem avait reconnu à titre posthume l'ancien coureur cycliste du Tour de France et du Giro d'Italie, Gino Bartali, comme Juste parmi les Nations pour ses actions courageuses dans le sauvetage de Juifs pendant la Shoah. Son nom est gravé sur le Mur d'honneur dans le Jardin des Justes du Mont du souvenir.
Né à Florence en 1914, Gino Bartali est connu pour ses exploits cyclistes. Ce champion sur route s'est illustré dans les courses à étapes en remportant deux Tours de France (1938 et 1948) et trois Giro d'Italie (1936, 1937 et 1946). Des réalisations sportives remarquables qui ont fait de lui un héros particulièrement populaire et admiré.
Gino Bartali était un fervent catholique. Son mariage a été célébré par l'archevêque Elia Angelo Dalla Costa - reconnu Juste parmi les Nations en 2012 - raconte son fils Andréa Bartali. Mais l'homme d'Eglise et le cycliste entretiendront une relation étroite, bien au-delà de leurs convictions religieuses.
Avec l'Occupation de l'Italie par l'Allemagne, en septembre 1943, Bartali, grâce à sa couverture idéale de coureur cycliste, officie comme passeur et va jouer un rôle important dans le sauvetage des Juifs. Il intègre le réseau initié par le rabbin Nathan Cassuto dont Dalla Costa fait aussi partie.
Bartali, connu pour les longues distances d'entraînement qu'il parcourt à vélo, va ainsi faire passer des faux documents dans la clandestinité. En cas d'arrestation et de fouilles, Bartali s'appuie sur son statut de cycliste professionnel : il demande que l'on ne touche pas sa bicyclette, calibrée au millimètre près pour atteindre une vitesse optimale.
Un certain nombre de survivants de la Shoah, comme Giulia Baquis, Shlomo Goldenberg-Paz et son cousin Auerlio Klein, ont témoigné à Yad Vashem des initiatives et des actions de sauvetage de Barali en temps de guerre.
Après la guerre, Bartali n'a jamais parlé de ses faits de résistance pendant l'occupation allemande. L'essentiel de ses actes de bravoure et de son courage reste donc méconnu. Sara Corcos a travaillé pour le CDEC (Centro di Documentazione Ebraica Contemporanea) à Milan. Elle a confié à sa nièce, Shoshan Evron, la fille du rabbin Nathan Cassuto, avoir rencontré Gino Bartali après la guerre. Il était alors catégoriquement opposé à toute interview. Il avait été guidé par sa conscience, expliquait-il, et ne tenait donc pas que son activité soit consignée. Ce n'est que lorsque Corcos lui révèlera son lien de parenté avec la famille Cassuto, qu'un Bartali profondément ému acceptera de témoigner, à condition de ne pas être enregistré. S'en suivra une conversation officieuse, au cours de laquelle Gino Bartali confiera à Corcos son rôle de passeur et ses distributions de faux-papiers.
Lors de la cérémonie, Avner Shalev a rappelé la motivation de Gino Bartali à "faire ce qui était juste, quitte à aller contre la majorité". Et d’ajouter : «nous continuerons à nous inspirer de son histoire et nous nous en souviendrons pour les générations à venir.
Sylvan Adams a qualifié Bartali de "plus grand cycliste de son époque, et d’être humain plus grand encore. Cette année, le Giro est dédié à la mémoire de Gino Bartali - un héros italien, un héros du peuple juif, et un héros de humanité."
Gioia Bartali, qui a perdu son père plus tôt cette année, a déclaré être venue à Yad Vashem, en ce jour, "en tant que petite-fille de Gino, pour témoigner de ses actions héroïques... Mon grand-père était un grand champion de sport", a-t-elle rappelé, "mais aujourd’hui, on se souviendra de lui comme d’un champion de vie."