Une journée ensoleillée que ce jeudi 12 avril 2018 à Yad Vashem. Comme tous les ans, Yom Hashoah, la Journée du souvenir et de l'héroïsme, est une date-clé pour l'institution. Un rendez-vous avec l'histoire, éloquent, sur fond de solennité et d'émotion. Mais ce qui fascine avant tout sur le campus de Yad Vashem en cette journée de commémoration, ce sont la dynamique, la vivacité, la vitalité aussi, qui émanent de ce lieu de mémoire. En ce 27 Nissan, Yad Vashem rend hommage aux morts en célébrant la vie.
La veille au soir, les cérémonies officielles - retransmises en direct avec traduction simultanée en français pour la première fois cette année - ont donné lieu à des discours poignants, retraçant les parcours improbables de ces 6 survivants choisis pour allumer les flambeaux de la mémoire. Le ton est donné. La Shoah dans toute son horreur s'affiche sur les écrans, la mémoire se ravive, le souvenir se fait violent. Raconter pourtant, transmettre, encore et toujours.
Le lendemain, Yad Vashem devient terre de contrastes. La tonalité du jour se veut plurielle, la solennité du moment prenant des formes d'expressions diverses. Sur l'esplanade de la place du ghetto de Varsovie, à quelques rangs des officiels du gouvernement venus représenter les instances de l'Etat d'Israël, des délégations du monde entier - Amis de Yad Vashem, réseaux de Villages de Justes - se saluent avec ferveur. Certains se reconnaissent d'une année sur l'autre. L'ambiance est chaleureuse, jusqu'à ce que la sirène, qui résonne à 10 heures sur la place et dans tout Israël, fige l'assemblée dans un élan de communion.
En de jour de Yom Hashoah, le campus grouille de groupes de jeunes, d'anciens, de touristes ou de locaux. La commémoration se fait dans le vivre-ensemble, le mélange des langues, des âges, des religions. La mémoire, pourtant si individuelle, se veut commune, comme si tous se tenaient là, en ce jour, pour proclamer à l'unisson : "je me souviens des morts, mais je suis vivant".
A l'image d'une journée Portes ouvertes, Yad Vashem offre un aperçu de ce qui se trame dans ses coulisses. Ici, une conférence sur les Justes des Nations ; là, une présentation de quelques pièces d'exception par la directrice du Musée d'art de Yad Vashem ; ou encore, une visite unique dans l'antre des archives de l'institution. Car loin d'être un mémorial statique, Yad Vashem est une institution qui vit, respire, honore le passé dans un souci d'avenir.
Deux heures durant, la Crypte du souvenir a résonné des voix émues de ceux, officiels et surtout anonymes, qui ont fait le choix de participer à la lecture des noms de leurs proches. Bien souvent venus en famille, sur plusieurs générations, les anciens ont décliné à haute voix l'identité des victimes pendant que les plus jeunes déposaient une rose blanche sur les noms des camps gravés au sol. Autre moment d'émotion, le dépôt des gerbes des délégations amies. Un geste fort, significatif, tout en symbole pour ceux qui ont parfois traversé le globe, venus d'Argentine, de France ou de Lituanie, pénétrés de cette responsabilité de commémorer l'indicible.
Enfin, point final de cette journée de recueillement, la Marche de la jeunesse, qui rassemble des jeunes issus de tous les mouvements de jeunesse israéliens, laïcs ou religieux, depuis le Mont Herzl jusqu'à la communauté des vallées, pour finir par le témoignage d'un survivant, en présence du ministre de l'Education Naftali Bennett et l'accompagnement musical de la chanteuse Youval Dayan. Là encore, la réunion du vivre-ensemble, de l'émotion, de la vie.
Résumé intense du quotidien de Yad Vashem, Yom Hashoah cristallise et exacerbe ce qui constitue le fondement de l'institution : être un mémorial vivant en souvenir de la Shoah pour préserver la mémoire du passé et lui donner un sens pour les générations à venir.