"זְכֹר יְמוֹת עוֹלָם בִּינוּ שְׁנוֹת דּוֹר וָדוֹר שְׁאַל אָבִיךָ וְיַגֵּדְךָ זְקֵנֶיךָ וְיֹאמְרוּ לָךְ" דברים ל"ב ז'
Souviens-toi des jours antiques, médite les annales de chaque siècle ; interroge ton père, il te l'apprendra, tes vieillards, ils te le diront !
Deutéronome 32 : 7
Zachor- Apprentissage et Commémoration
Zachor- Apprentissage et Commémoration« Dans la tradition juive, le commandement de se souvenir est souverain. Mais son obligation ne se termine pas avec l'acte cognitif de la mémoire - il doit être connecté à la fois au sens et à l'action. Aujourd'hui, nous pour qui la mémoire est brûlée dans nos cœurs et dans nos chairs ; nous nous rassemblons pour passer le flambeau de la mémoire à la génération suivante. Nous vous transmettons également la leçon fondamentale du judaïsme : cette mémoire doit être accompagnée d'une action d'intention éthique et morale. Cela doit être le fondement et le centre de vos énergies vers la création d'un monde meilleur.
L'acte d'apprendre est l'acte d'acquérir des connaissances, et c'est sur la base des connaissances que nous pouvons apprendre des leçons, agir et nous efforcer de nous améliorer. L'une des conditions pour apprendre du passé est de le connaître. Dans le contexte de la Shoah, cette idée est d'une importance cruciale. Étant donné que la Shoah est l'un des événements les plus importants de l'Histoire et un événement d'une importance humaine et éthique extrême, la connaissance du meurtre de la communauté juive européenne est une obligation humaine. Cependant, la connaissance n'est pas une valeur isolée. La citation ci-dessus est tirée d'un article rédigé par des survivants de la Shoah et lu par le survivant Tsvi Gill lors d'une conférence internationale, « L'héritage des survivants de la Shoah », qui s’est tenue à Yad Vashem en avril 2002. Par leurs propos, ces personnes, qui ont en fait vécu les atrocités des nazis et de leurs collaborateurs, ont exprimé leur vision de la mémoire de la Shoah et de son rôle pour le patrimoine de l'humanité. Instruire la Shoah, selon la vision de Yad Vashem, ressemble à la façon dont les survivants décrivent l'importance de la mémoire - des connaissances couplées à des valeurs et une volonté éthique et morale.
- Remarques de Tsvi Gill (en hébreu) dans son message de clôture à la Conférence sur l'héritage des survivants de la Shoah (avril 2002 à Yad Vashem). Traduit en anglais dans Our Living Legacy, Yad Vashem, 2003, p. 7.
Le rôle des témoignages
Le rôle des témoignagesL'une des questions qui préoccupent souvent les éducateurs de la Shoah est de savoir comment déterminer la bonne façon d'enseigner ce sujet et, plus précisément, quelles sources utiliser. Le corpus de connaissances de tout événement historique est consolidé en combinant de nombreuses sources de types différents. La Shoah est l'un des événements les plus documentés de l'Histoire ; les documents officiels nazis, les documents officiels des Alliés et les documents personnels des Juifs et des non-Juifs ne sont que quelques catégories générales dans lesquelles entrent des millions de documents de cette période. Outre les documents produits pendant la Shoah, il faut également se référer aux sources produites après la guerre. Les procès-verbaux des criminels nazis, par exemple, contiennent des témoignages des auteurs et des victimes qui ont survécu. La documentation sur la Shoah peut également être divisée en fonction de son origine, juive ou autre. La connaissance des documents juifs en général et des documents personnels juifs (journaux intimes, lettres, témoignages) en particulier peut offrir une valeur supplémentaire. Ces documents nous permettent d'entendre la voix personnelle des victimes de la persécution. Dans le contexte de l'éducation sur la Shoah, cette voix personnelle améliore l'efficacité du processus d'apprentissage.
Au fil des ans, de nombreux survivants ont choisi de témoigner dans différents médias et leurs témoignages sont maintenant utilisés à des fins éducatives. Il est préférable d’apprendre la Shoah à partir de sources multiples, notamment les témoignages de survivants qui occupent une place de choix.
Le rôle des témoignages de survivants dans la mémoire et l'éducation de la Shoah est crucial pour deux grandes raisons :
- « La création du ghetto n'est, bien entendu, qu'une mesure provisoire […]. Le but final doit en tout cas être de cautériser totalement ce fléau », a déclaré Friedrich Übelhör, chef du district de Kalisz, dans son ordre de ghettoïser les juifs de Lodz (19 décembre 1939).
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Le 19 juillet 1944, les Allemands ont commencé à rassembler les 2 000 Juifs de Rhodes et de Kos. Après avoir été détenues pendant plusieurs jours, les victimes ont été chargées sur des barges à destination d'Athènes et puis transportées à Auschwitz-Birkenau. Au cours de leur voyage de huit jours, les navires se sont arrêtés à Leros et ont récupéré l'unique résident juif de l'île. Ce sont là deux des nombreux éléments, déclarations et événements qui nous enseignent que les nazis ne considéraient pas les Juifs comme des êtres humains mais comme des parasites qui devaient être complètement exterminés. Par conséquent, ils se sont fixés pour objectif d'éliminer tous les Juifs sur lesquels ils pouvaient mettre la main et de gommer toutes les preuves de leurs crimes. Compte tenu de cette intention, le fait que les Juifs survivants aient pu parler de ce qui s'est passé, parler de ceux qui n'ont pas survécu et raconter leur expérience humaine est d'une grande force et d'une grande importance.
- Parler de la Shoah implique de parler de chiffres. Si les gens veulent acquérir des connaissances historiques et comprendre, ils doivent savoir qu’environ 6 000 000 Juifs ont été assassinés. S'ils souhaitent appréhender les conditions inhumaines dans le ghetto de Varsovie, par exemple, ils doivent savoir que la ration alimentaire quotidienne que les Allemands allouaient à chaque habitant du ghetto était de 184 calories. La Shoah, que l’on peut résumer par une série d'atrocités infligées par des personnes à d’autres personnes, soulève des questions morales et éthiques d’une grande importance ; il est essentiel de raconter l'expérience humaine des victimes à la première personne du singulier afin qu'elle puisse être au moins partiellement comprise. Ici, il convient de noter l'importance de se renseigner sur les aspects humains des protagonistes non-Juifs, notamment ceux qui ont sauvé des Juifs au péril de leur vie ; ceux qui se sont contentés d’être des simples spectateurs de ce terrible chapitre de l’histoire ; les collaborateurs et les bourreaux Cela doit faire l’objet d’un autre débat.
- Documents sur la Shoah, Yitzhak Arad, Israel Gutman et Abraham Margaliot (éd.), p. 194.
Témoignage » - Définitions du dictionnaire
Témoignage » - Définitions du dictionnaireCelui qui recherche le terme « témoignage » dans les dictionnaires et les encyclopédies rencontre plusieurs définitions qui se répartissent en trois catégories principales :
- Significations juridiques :
a) toutes déclarations, orales ou écrites, présentées dans une affaire judiciaire ou une audience délibérative.
b) quelque chose qui sert de preuve.
- Significations liées à l'authentification qui n'ont pas nécessairement un lien juridique:
a) une affirmation qui offre une authentification de première main d'un fait.
b) une preuve ou une preuve à l'appui d'un fait ou d'une affirmation.
- Significations religieuses juives :
a) les tablettes de pierre sur lesquelles était inscrites la Loi de Moïse.
b) l'arche qui contenait ces tablettes.
Quelle définition est pertinente pour les témoignages de survivants de la Shoah ? Nous pouvons aborder cette question sous deux angles différents :
- La façon dont les survivants voient le témoignage. Pour en savoir plus sur ce sujet, référez-vous à "Bearing Witness", the central theme of Holocaust Remembrance Day 2007.
- Le point de vue éducatif, celui qui est l’objet de cet article. Ainsi, pour déterminer la définition pertinente des témoignages dans le domaine de l'éducation, examinons les objectifs de l'intégration des témoignages dans l'éducation sur la Shoah.
De nombreux éducateurs utilisent des témoignages audiovisuels et tentent d'inviter les survivants à témoigner devant leurs publics. Cela soulève plusieurs questions clés : quel rôle joue un témoignage dans le processus éducatif ? Quelle est la bonne façon d'aborder un témoignage ? Un témoignage peut-il être utilisé comme une leçon d'histoire ? Peut-il s'agir de la seule activité liée à la Shoah à laquelle les élèves participeront ? Quel rôle les élèves/éducateurs devraient-ils jouer lorsqu'ils entendent un témoignage ? Chaque témoignage convient-il à toute classe ? Sinon, quels critères faut-il garder à l'esprit lors du choix d'un témoignage ? Ce ne sont là que quelques-unes des questions auxquelles sont confrontés les enseignants impliqués dans l'éducation sur la Shoah. Ce document propose de répondre à certaines des questions et de fournir des outils pour répondre à d'autres.
Objectifs de l'utilisation des témoignages en classe
Objectifs de l'utilisation des témoignages en classe- Réhumaniser les victimes : L'un des principes fondamentaux de la philosophie pédagogique de Yad Vashem est la réhumanisation des personnes impliquées dans la Shoah et, en particulier, des victimes. La Shoah ne sera probablement jamais « comprise ». S’il faut d’une part l’examiner d'un point de vue éducatif, elle peut et doit cependant être traitée comme un ensemble d'histoires humaines accessibles et tangibles. Les histoires personnelles racontées par les survivants de la Shoah présentent les Juifs comme des êtres humains et rétablissent leur identité, permettant ainsi au public de se montrer solidaires à eux dans leur terrible détresse.
- Rendre l'inconcevable plus tangible : « […] De nombreux survivants […] se souviennent que les SS trouvaient plaisir à en avertir cyniquement les prisonniers : « De quelque façon que cette guerre finisse, nous l'avons déjà gagnée contre vous ; aucun d'entre vous ne restera pour porter témoignage, mais même si quelques-uns en réchappaient, le monde ne les croira pas […]. Les gens diront que les faits que vous racontez sont trop monstrueux pour être-crus : ils diront que ce sont des exagérations de la propagande alliée […]. L'histoire des Lager, c'est nous qui la dicterons. »
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L'essence de la Shoah est difficile à saisir, tout comme nombre des histoires humaines qui y sont liées. L'apprentissage de la Shoah à travers une documentation historique combinée à l'écoute de récits personnels de personnes qui ont réellement vécu cette période permet de rendre ces événements plus tangibles et réels.
- Transmettre des messages moraux : « Tu ne tueras point » ! Ce principe fondamental de la morale humaine a été annoncé à toute l'humanité depuis les hauteurs du mont Sinaï. Le souvenir du meurtre de six millions de Juifs par les nazis et leurs complices nous oblige à donner suite à cette injonction. La vie est un don de la création, sa forme et son essence une déclaration d'égalité ultime entre tous ceux créés à l'image divine. Dans cette optique, il semblerait évident et incontestable que ce commandement fondamental oblige toute l'humanité. Pourtant, il est bafoué à outrance aux quatre coins du monde. En tant qu'éléments de l'héritage de la Shoah, nous devons nous efforcer sans relâche de résoudre les conflits humains, entre les États et entre les peuples, de manière à éviter les effusions de sang inutiles.''
4 Un message moral délivré par une personne qui a vécu les atrocités de la Shoah a un pouvoir particulier qui est d'autant plus amplifié lorsqu'il est transmis par le contact personnel entre un survivant et des élèves.
- Souligner l'obligation morale d'être conscient de la souffrance humaine : L’auto-responsabilité est l’une des principales leçons morales que l’on peut tirer de la Shoah. Cette question peut être discutée, par exemple, à travers les thèmes des bourreaux, des collaborateurs et des spectateurs. Rencontrer un survivant et écouter son témoignage est un moyen de souligner l'obligation morale ainsi que la responsabilité personnelle, comme l'exprime Roger Simon : «La commémoration insiste [sic] sur le visage du récit historique, et renforcée par son engagement émotionnel avec la souffrance d'autrui, on a l'obligation de maintenir - toujours - un présent intemporel juste et tolérant, jamais exclu de toute forme d'existence humaine. »
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- Transformer les élèves en passeurs de mémoire : « Quand on témoigne par le témoignage, on rend toujours témoignage à quelqu'un »
6 , écrit Roger Simon, suggérant le résultat souhaité de l'audition d'un témoignage en direct et d'un témoignage audiovisuel. En tant que professionnels qui s'occupent de la mémoire et de l'éducation sur la Shoah, nous devons nous préparer à une époque où il n'y aura plus personne pour raconter la Shoah à la première personne du singulier. Les préparatifs de cette époque prennent différentes formes, dont la collecte de série de témoignages audiovisuels. Lorsque vous utilisez un témoignage en classe, le résultat souhaité de cette rencontre est que les élèves se sentiront désormais obligés de se faire les porteurs de la mémoire. Cet objectif peut également être lié à la notion d'auto-responsabilité, comme indiqué ci-dessus. L'idée de transformer les élèves en passeurs de mémoire est également importante lorsque l'on considère le phénomène du déni de la Shoah.
- Primo Levi, Les naufragés et les rescapés (Editions Gamillard, 1989(, p.8
- Remarques de Tsvi Gill (en hébreu) dans son message de clôture à la Conférence sur l'héritage des survivants de la Shoah (avril 2002 à Yad Vashem). Traduit en anglais dans Our Living Legacy, Yad Vashem, 2003, p. 7
- Roger Simon, « La contribution du témoignage audiovisuel de l'Holocauste à la mémoire, à l'apprentissage et à l'espoir », dans Cahier International sur le Témoignage Audiovisuel 1 (1998), p. 144.
- Ibid p. 147.
Utilisation du témoignage en classe - Questions pratiques
Utilisation du témoignage en classe - Questions pratiquesChoix du médium. La voix personnelle de la victime peut être articulée de différentes manières : présentation d'un témoignage en classe par un survivant, témoignage audiovisuel ou témoignage écrit sous forme de journal intime ou de mémoires. Les œuvres d'art comme une nouvelle, un roman, un poème, une peinture ou une sculpture peuvent également être considérées comme des types de témoignage. Comment choisir le bon type de témoignage ? La discussion ci-dessous se concentre sur deux des nombreux aspects qui peuvent être pris en compte lors du choix des témoignages :
- Âge des élèves : l'âge est un critère crucial pour décider ou non de l’enseignement de la Shoah et de son contenu. Selon la philosophie pédagogique de Yad Vashem, la Shoah peut être enseignée dès le plus jeune âge tant que c'est fait correctement. Le modèle proposé est un modèle en spirale. Dans la première étape, les enfants font connaissance avec les termes de base de la Shoah à travers l'histoire d'un individu. Les principes essentiels qui guident l'enseignement de la Shoah dans cette tranche d'âge sont les suivants :
- Utilisation de l’histoire d’une personne.
- Choix d'une histoire aux aspects optimistes : le protagoniste a survécu, des actes de bonté humaine ont eu lieu. Cela évite à l'enfant d'être exposé à des horreurs et aux mauvais aspects de ce chapitre de l’histoire et démontre l'existence de valeurs humaines positives.
- Accompagnement constant de l'enfant par un éducateur avec lequel il entretient une relation positive et durable.
Dans ce type de discussion, l'enseignant et les enfants explorent les aspects fondamentaux de la réalité changeante d'un individu, de préférence un enfant, par exemple une petite fille qui doit emménager dans un ghetto : que prend-elle avec elle ? À quoi ressemble sa vie dans le ghetto ? Quel est son ressentiment sur le port d'un insigne juif ? Que signifie grandir dans le ghetto ?
L'étape suivante, pour les enfants plus âgés, suscite une discussion plus large qui se réfère à une famille. La connaissance d'une famille comprend un plus grand nombre de personnes, aux destins différents et des relations diverses qui se tissent entre les personnes et les groupes. La discussion concernant une famille est importante car il s'agit d'un cadre social que tous les élèves connaissent et peuvent comprendre. À ce stade, les enfants peuvent également être encouragés à aborder non seulement le point de vue des victimes mais aussi celui du sauveteur.
Lorsque les enfants entrent dans l'adolescence, ils commencent à consolider leur identité personnelle, leur identité sociale et nationale et leurs valeurs humaines. Par conséquent, dans cette troisième phase, ils peuvent se rapporter à un cercle social plus large - une communauté dans son ensemble. Leur perception cognitive et émotionnelle étant plus mature, les adolescents peuvent faire face à des problèmes psychologiques d'une complexité qui transcende ceux de la victime. Ils peuvent désormais s'attaquer aux dilemmes du sauveteur, à la question du spectateur et enfin aux bourreaux.
En résumé, la confrontation au thème de la Shoah devrait être établie progressivement, d’une manière qui corresponde au stade de développement émotionnel et cognitif des élèves.
La rencontre avec ces différents cercles humains fait prendre conscience des diverses situations et problèmes auxquels les Juifs ont été confrontés pendant la Shoah. Si elle est menée correctement, elle réduit la tendance à porter un jugement et encourage la réflexion sur soi.
Le choix du témoignage doit également être guidé par les critères clés suivants :
Témoignages pour des élèves du primaire et du collège : un enseignant qui souhaite inviter un survivant à témoigner ne doit adresser l'invitation qu'après s’être entretenu préalablement avec le survivant. Là, l'enseignant doit expliquer que l'histoire doit être racontée de manière à ce que les élèves ne soient pas traumatisés. Il ne faut pas présenter aux élèves du primaire et du secondaire un survivant dont l'histoire comprend des descriptions horribles de la vie et de la mort dans les camps. Un survivant qui aurait passé la guerre à se cacher serait un meilleur choix.
Témoignages pour des 'élèves du secondaire : Au secondaire, les élèves sont prêts à faire face à des histoires plus difficiles. Par conséquent, les objets personnels de personnes qui n'ont pas survécu peut également être utilisé avec des élèves plus âgés. Cependant, il incombe toujours à l'enseignant de faire au préalable une première recherche sur l'histoire et de faire preuve de jugement dans le choix des témoignages qui correspondront aux caractéristiques cognitives et émotionnelles des élèves.
- Contexte local : ceux qui enseignent la Shoah sont souvent confrontés au dilemme de savoir où placer l'accent dans le temps limité dont ils disposent. Doivent-ils présenter une image générale de la Shoah en Europe ou se concentrer sur les événements qui ont eu lieu dans leur propre pays ? Idéalement, ils devraient trouver un équilibre entre les deux. Ainsi, pour transmettre une compréhension historique de la Shoah, les enseignants devraient présenter un contexte plus large sans négliger les aspects locaux spécifiques. Par conséquent, lors du choix des témoignages, il est extrêmement important d'essayer de présenter un témoignage local et de le placer dans le contexte historique qui convient. Les enseignants peuvent également demander à leurs élèves s'ils ont des grands-parents survivants qui sont prêts à raconter leur histoire.
Une dernière remarque : notre discussion n'a pas fait référence au choix entre un témoignage en direct et un témoignage enregistré. Une rencontre en direct avec un survivant de la Shoah a une valeur supplémentaire, celle de la qualité de l'interaction personnelle directe ; par conséquent, il est généralement préférable d'utiliser des témoignages de vive voix, dans la mesure du possible.
Préparation
PréparationDifférents types de témoignages nécessitent différents types de préparations. Toutefois, plusieurs principes généraux sont pertinents dans tous les cas.
L'une des étapes les plus importantes consiste à planter un contexte historique. Le témoignage d'un survivant est une micro-histoire, l'histoire d'une personne racontée dans une perspective spécifique et subjective. Bien qu'il ait un grand pouvoir en soi, son sens plus complet, en particulier dans le sens éducatif, est recueilli lorsqu'il est placé dans un contexte spécifique. Notre mandat moral nous oblige à rechercher les aspects universels de la Shoah. Une telle discussion, cependant, ne peut avoir de sens que si elle est ancrée dans une compréhension de la réalité historique. Par conséquent, l’enseignant a l’obligation de fournir aux élèves un contexte historique suffisant avant de rencontrer le survivant face à face. Le contexte historique comprend des termes importants dans la compréhension du témoignage, par exemple, ghetto, camp de travail / transit / concentration / extermination et rafle. Si les élèves ne connaissent pas ces termes, ils n’auront qu’une compréhension partielle de l'histoire.
Lors de la préparation d'une rencontre face à face avec un survivant, un travail de base spécifique vis-à-vis des trois acteurs humains de la réunion - l'enseignant, le survivant et les élèves - doit être effectué :
Enseignant et survivant : L'enseignant est un personnage clé dans la préparation des élèves à la réunion. Il doit rencontrer le survivant avant que celui-ci ne rencontre les élèves afin de poser les grandes lignes de la rencontre. Premièrement, ce premier contact humain peut contribuer à un environnement plus confortable pour la rencontre avec les élèves. Deuxièmement, l'enseignant et le survivant peuvent utiliser la réunion préliminaire pour clarifier leurs attentes mutuelles. En discutant avec le survivant, l'enseignant se familiarisera avec l'histoire du survivant et pourra guider celui-ci pour le conduire vers des points clés lors de la rencontre avec les élèves. Il est conseillé de suggérer que le survivant non seulement raconte ses expériences pendant la Shoah, mais aussi qu'il décrive sa vie avant et après la Shoah. L'enseignant peut discuter avec le survivant de diverses questions que les élèves peuvent poser et lui faire savoir qu'il n'est pas obligé de répondre à toutes les questions.
Élèves : Il est essentiel de fournir aux élèves des informations de base sur le survivant et son histoire. L'enseignant peut signaler des lieux et des termes importants qui peuvent apparaître dans l'histoire et les replacer dans le contexte historique qu'il a déjà donné. Connaissant la signification des termes historiques, les élèves pourront se concentrer sur l'expérience humaine de l'histoire. L'enseignant peut également conseiller aux élèves d'écrire des questions tout en écoutant le témoignage et de les poser à la fin. Il est important d'encourager les élèves à poser des questions et d’indiquer au témoin qu’on l’interrogera certainement sur son passé, car le contact humain mutuel est la valeur ajoutée d'une rencontre en direct avec le témoin.
- La discussion suivante est inspirée de l'article en hébreu Rencontre des survivants de la Shoah avec les élèves.
Suggestions en matière d'activités préparatoires
Suggestions en matière d'activités préparatoires- À quoi s'attendre et à quoi ne pas s'attendre : il est important pour l'enseignant de sonder les attentes des élèves quant à leur rencontre avec le survivant. « Nous ne sommes ni historiens ni philosophes, mais des témoins », explique Primo Levi lors d'une discussion sur ses expériences en tant que témoin
8 . Dans le processus éducatif, les témoignages ne devraient pas être la principale source de connaissances et de compréhension historiques. Comme la plupart des survivants ne sont pas des historiens, l'éducateur devrait leur demander de raconter des histoires personnelles qui agiront en parallèle avec les détails historiques que les élèves acquièrent d'autres sources primaires et secondaires.
- En fonction de la classe et l'enseignant, il est également possible de mener une discussion avant la rencontre, au cours de laquelle les élèves seront encouragés à suggérer des questions qu'ils aimeraient poser au survivant.
- Primo Levi, Primo Levi, Les naufragés et les rescapés (Editions Gamillard, 1989( , p. 147.
Défis
DéfisTout en travaillant avec des témoignages et en profitant de leurs valeurs, l'enseignant, et dans certains cas les élèves également, doivent être conscients des caractéristiques spécifiques liées à cette source de connaissances.
- ''La mémoire humaine est un instrument merveilleux mais trompeur. C'est une vérité usée, connue non seulement des psychologues, mais aussi de quiconque a regardé avec attention le comportement de ceux qui l'entourent ou son propre comportement.''
9 Ainsi, Primo Levi souligne l’une des principales limites des témoignages des survivants. Jamais deux personnes qui ont partagé une expérience ne s'en souviendront de la même manière. La mémoire humaine est influencée par divers éléments qui la façonnent. Les croyances, les traits de personnalité, les expériences de vie, les connaissances postérieures, la répression et l'érosion causées par le temps qui passe ne sont que quelques-uns des éléments qui affectent la façon dont notre mémoire est façonnée. Les écarts entre un témoignage donné peu de temps après les événements et un autre témoignage du même témoin des années plus tard sont assez courants. Les inexactitudes dans les dates et les détails font également partie intégrante du médium du témoignage. Il est du devoir de l'enseignant d'être conscient de ces particularités. Il est également de son devoir soit de se préparer aux questions des élèves sur ce sujet, soit d'engager une discussion sur la question de la mémoire et des témoignages.
- La Shoah a été le meurtre systématique, pour des raisons idéologiques, d'environ 6 000 000 de Juifs pendant la Seconde Guerre mondiale. Des histoires sur des expériences personnelles à cette époque sont bien sûr racontées par ceux qui ont survécu. Ce sont les histoires des vivants plutôt que des morts. C'est pourquoi nous devons faire très attention à ne pas construire une vision biaisée de ce qui s'est passé. Un tel biais peut se produire, par exemple, dans une discussion sur Auschwitz-Birkenau. Parallèlement au meurtre en masse de Juifs, Birkenau fonctionnait comme un camp de travail qui exploitait des milliers de prisonniers juifs et non-juifs. Des trains amenaient chaque jour des milliers de Juifs au camp. La plupart de ces Juifs ont été immédiatement envoyés dans les chambres à gaz. La condamnation à mort de la minorité, choisie pour le travail, était reportée. Finalement, la plupart d'entre eux sont morts du travail et de la famine ou ont finalement été envoyés aux chambres à gaz. Lorsqu'on entend les témoignages d'anciens prisonniers à Auschwitz, on peut facilement se focaliser sur la « vie dans le camp » et oublier qu'Auschwitz était avant tout un camp d'extermination et que ceux qui peuvent encore en raconter l'histoire ne sont qu’une petite minorité.
- Primo Levi Primo Levi, Les naufragés et les rescapés (Editions Gamillard, 1989( , p. 20.
Conclusion
ConclusionNous avons commencé cette discussion en fournissant plusieurs définitions du mot « témoignage » dans le dictionnaire et en établissant trois catégories d’acceptions. En examinant le rôle des témoignages de survivants au lendemain de la Shoah en général et dans la mémoire et l’éducation de la Shoah en particulier, nous constatons qu’ils contribuent à chacune de ces catégories.
Certains survivants de la Shoah ont témoigné devant le tribunal, fournissant ainsi des « preuves de première main » dans le cadre d’actions en justice contre des criminels de guerre. Au cours des vingt dernières années, certains d'entre eux ont de nouveau témoigné, cette fois pour faire face au phénomène nouveau et ancien du déni de la Shoah.
Lorsqu'ils sont donnés dans le contexte général de la mémoire et dans le contexte plus spécifique de l'éducation, les témoignages ont un objectif différent, expliqué ci-dessus, celui d'authentifier des événements si difficiles à saisir. Enfin, de nombreux survivants témoignent dans le but de transmettre des messages moraux. Ce faisant, ils s’associent en quelque sorte à la troisième définition du terme « témoignage ». « Tu ne tueras point », l’impératif qui apparaît dans le document du survivant cité ci-dessus, est probablement le commandement qui ressort implicitement de tous les témoignages.