17 juillet 1942

Vélodrome d'Hiver

« ce n'est pas possible qu'une chose aussi horrible nous est [sic] arrivée et pourtant c'est la triste vérité »

Le lendemain, les conditions épouvantables de l'incarcération au Vélodrome d'Hiver commencent à faire des victimes. Du fait du manque de nourriture, d'eau et d'installations sanitaires, de la chaleur étouffante, du désespoir croissant et de l'indifférence manifestée par ses co-détenus, Rachel se blesse et n'est plus en état de marcher. Elle envoie pourtant à madame Sebbane une deuxième lettre, polie et pleine d’excuses, dans laquelle il apparaît clairement qu'elle a décidé de veiller sur ses proches. Elle demande notamment à madame Sebbane du pain et un biscuit pour la petite Liliane Zonszajn, âgée de 3 ans. Etonnamment, elle pense encore à ses clients, à honorer ses commandes de travaux de fourrure et à coordonner celles-ci avec madame Sebbane.

Entrée du Vél' d'Hiv'
Lettre de Rachel Polakiewicz : 17 juillet 1942, Vélodrome d'Hiver

Paris le 17
Chers tous,
Encore quelques mots pour vous dire que nous sommes toujours au Vel d'Hiv. Cette nuit, nous nous sommes allongés par terre, mais il y avait un va-et-vient continuel, quelqu'un m'a marché sur les pieds et il m'a bien arrangée. Je ne peux presque pas marcher, mon petit doigt est tout en sang. Enfin, ce n'est rien à côté de notre bien triste situation. Nous n'avons plus grand-chose à manger et nous manquons de pain surtout, et avec ça, combien de temps resterons-nous ici ? Je vous assure qu'on croit rêver, ce n'est pas possible qu'une chose aussi horrible nous est [sic] arrivée et pourtant c'est la triste vérité. On entend de temps en temps des cris de femme, ça nous donne la chair de poule. Madame Sebban [sic], si vous pouvez nous envoyer quelque chose, vous serez bien gentille, ça nous embête de vous le demander car nous savons que vous avez assez de dérangements sans ça. Mon père aussi se fait du mauvais sang et il vous demande de bien vouloir passer chez son patron et lui expliquer son cas. Vous direz que nous nous trouvons tous ici. C'est rue d'Hauteville n°38 Mr Fontebride, ou s'il n'y a personne, chez Mr Brochard, 135, rue Vieille du Temple.

Si vous pouvez nous envoyer 1 ou 2 petites casseroles, ça nous servira bien. Prenez-les chez nous ou chez Mme Zonszajn. Nous n'avons plus de pain et impossible de nous en procurer. Je vous envoie des tickets, si vous pouvez trouver des petits gâteaux pour Liliane. Sur le colis, mettez votre adresse de retour car si on n'est plus là, qu'on puisse vous le retourner. Je pense qu'Odette a écrit à Armand. Tout le monde vous embrasse bien des fois. Bonjour aux voisins et à la concierge.

De bien gros baisers pour vous tous,

Rachel.

Jeannette, la petite amie à Raphaël se trouve ici également

Si vous pouvez, envoyez-moi quelques cartes interzones et quelques enveloppes. Merci

Si je n'attrape pas une maladie de coeur, je serai en fer.

Lettre de Rachel Polakiewicz :  17 juillet 1942, Vélodrome d'Hiver
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