Quelques jours avant la descente à la maison d'enfants d'Izieu, la petite Liliane Gerenstein, âgée de onze ans, écrivit à Dieu une lettre poignante. On retrouva la lettre dans l'établissement après l'arrestation des enfants.
« Dieu ? Que vous êtes bon, que vous êtes gentil et s'il fallait compter le nombre de bontés et de gentillesses que vous nous avez faites il ne finirait jamais… Dieu ? C'est vous qui commandez. C'est vous qui êtes la justice, c'est vous qui récompensez les bons et punissez les méchants. Dieu ? Après cela je pourrai dire que je ne vous oublierai jamais. Je penserai toujours à vous, même aux derniers moments de ma vie. Vous pouvez être sûr et certain. Vous êtes pour moi quelque chose que je ne peux pas dire, tellement que vous êtes bon. Vous pouvez me croire.
Dieu ? C'est grâce à vous que j'ai eu une belle vie avant, que j'ai été gâtée, que j'ai eu de belles choses, que les autres n'ont pas. Dieu ? Après cela, je vous demande qu'une seule chose : FAITES REVENIR MES PARENTS, MES PAUVRES PARENTS, PROTÉGEZ-LES (encore plus que moi-même) QUE JE LES REVOIS LE PLUS TÔT POSSIBLE, FAITES-LES REVENIR ENCORE UNE FOIS. Ah ! Je pouvais dire que j'avais une si bonne maman et un si bon papa ! J'ai tellement confiance en vous que je vous dis un merci à l'avance. »
Lettre de Liliane Gerenstein, tirée de Serge Klarsfeld, Les enfants d'Izieu, Une tragédie juive, 1984
Liliane était née en 1933 de l'union du musicien Alexandre Chapse-Gerenstein et de sa femme Chendlia née Entine. Alexandre et Chendlia, tous deux originaires d'Odessa, avaient émigré en France et s'étaient installés à Paris. Le frère de Liliane, qui s'appelait Maurice, était né en 1931. En novembre 1943, Alexandre et Chendlia furent déportés par le convoi 62 de Drancy à Auschwitz.
On ne sait pas quand Liliane vint résider à la maison d'enfants d'Izieu exactement. Le matin de la descente, son frère, dont le pensionnat avait fermé pour Pâques, vint l'y rejoindre. Leon Reifman, l'un des membres du personnel, le conduisit jusqu'à la maison avec son ami Max-Marcel Balsam, dont le frère Jean-Paul vivait également dans l'établissement. Les quatre enfants furent arrêtés lors de la descente et déportés le 13 avril 1944 de Drancy à Auschwitz, où ils furent assassinés.
Alexandre, qui fut musicien dans l'orchestre d'Auschwitz, survécut et émigra aux Etats-Unis. En 1983, il soumit des Feuilles de Témoignage à Yad Vashem en mémoire de ses enfants, Maurice et Liliane, et de sa femme Chendlia.
Mina et Claudine Halaunbrenner, les filles de Jacob et Ita-Rosa Halaunbrenner, étaient deux des petites filles qui furent arrêtées à Izieu et assassinées à Auschwitz.
Jacob et Ita-Rosa (originaires de Pologne) Halaunbrenner vivent en Autriche, où leur fils aîné, Léon, est né en 1929. La famille émigre ensuite à Paris et quatre autres enfants viennent au monde : Alexandre (1931), Mina (1935), Claudine (1939) et Monique (1941).
En 1943, Jacob et son fils Léon sont arrêtés par la Gestapo de Lyon. Léon, alors âgé de quatorze ans, est déporté à Auschwitz où on le force à travailler dans une mine de sel, il ne survivra pas. Jacob est incarcéré à Lyon et exécuté. Ita-Rosa, qui n'a ni argent ni travail ni relations, se retrouve seule avec les quatre enfants restants. Le coeur brisé, mais réconfortée par l'idée qu'ils seront en sûreté, au chaud et bien nourris, elle confie Mina, huit ans et Claudine, cinq ans, aux membres de l'OSE qui conduisent les filles à la maison d'enfants d'Izieu. Alexandre et Monique demeurent avec leur mère et tous trois survivront. Mina et Claudine sont arrêtées lors de la descente à la maison d'enfants d'Izieu, puis déportées le 30 juin 1944 de Drancy à Auschwitz où elles sont assassinées.
Ita-Rosa Halaunbrenner participera au combat mené pour faire traduire en justice en France, Klaus Barbie, dirigeant de la Gestapo de Lyon, et témoignera devant la cour.
En 1986, Liora Halaunbrenner, petite-fille d'Ita-Rosa, soumettra des Feuilles de témoignage à Yad Vashem en mémoire de Mina et de Claudine, de leur père Jacob et de leur frère Léon.
Hans Ament. L'un des enfants de la maison d'enfants d'Izieu, France. Hans, dix ans, fut assassiné à Auschwitz
Hans Ament, dix ans, était l'un des enfants de la maison d'enfants d'Izieu. Il fut arrêté lors de la descente, envoyé au camp de concentration de Drancy et déporté le 30 mai 1944 à Auschwitz où il fut assassiné.
Max Ament, né en Pologne, et sa femme Ernestina, originaire de Hongrie, vivaient à Vienne avec leurs fils Alfred (né en 1928) et Hans (né en 1934). En 1939, la famille partit pour la Belgique, avec l'intention d'émigrer aux Etats-Unis. En mars 1940, un visa américain fut délivré à Hans à Antwerp, mais en mai 1940, les Allemands envahirent la Belgique avant qu'il ait pu partir et les Ament s'enfuirent pour la France.
Max fut déporté de Drancy en mars 1943 et assassiné à Sobibor ou à Majdanek. Ce même mois, Ernestina fut admise dans un sanatorium pour les malades atteints de tuberculose, à quelques dizaines de kilomètres de la maison d'enfants d'Izieu où son petit garçon, Hans, avait été conduit. L'OSE fit passer, clandestinement, en Suisse, son fils aîné Alfred, alors âgé de seize ans.
Dans une lettre envoyée d'Izieu par Hans, dix ans, à sa mère au sanatorium, il écrivit :
« 100 000 000 gros baisers de votre fils qui pense à vous sans cesse. »
Hans fut arrêté avec les autres enfants de la maison d'Izieu et déporté le 30 mai 1944 de Drancy à Auschwitz, où il fut assassiné. Sa mère Ernestina mourut au sanatorium en août 1944. Son frère Alfred émigra aux Etats-Unis après la guerre. En 1986, Alfred Ament soumit des Feuilles de témoignage à Yad Vashem en mémoire de son père, Max et de son frère, Hans.
Rénate Krochmal, huit ans et Liane Krochmal, six ans, qui vivaient à la maison d'enfants d'Izieu, furent déportées le 13 avril 1944 et moururent en déportation.
En 1938, Yaakov et Amalie Krochmal-Kolboshover fuient l'Autriche pour la Belgique avec leurs trois enfants, Siegfried (né en 1931), Rénate (née en 1935) et Liane (née en 1937). Jacob avait un frère et une sœur aux Etats-Unis mais les tentatives effectuées pour obtenir des permis de séjour pour sa famille et pour lui-même se révèlent infructueuses.
La famille Krochmal est arrêtée et internée dans le camp de concentration de Rivesaltes, où Siegfried périt. Ses parents sont transférés à Drancy et en septembre 1942, ils sont déportés à Auschwitz, où ils sont assassinés. On ne sait ni quand ni comment Rénate et Liane sont arrivées à la maison d'enfants d'Izieu mais elles sont arrêtées au cours de la descente et déportées avec tous les autres enfants de l'établissement vers les camps d'extermination d'Europe de l'Est où elles seront assassinées.
En 1999, Zvi Carmeli (Krochmal), le neveu de Jacob et d'Amalie, a soumis des Feuilles de témoignage à Yad Vashem en mémoire des membres de sa famille, Siegfried, Rénate et Liane et leurs parents, Yaakov et Amalie.