Buchenwald

Les enfants


Créé en 1937, Buchenwald est à l’origine destiné à l’incarcération des opposants au régime nazi. S’il n’est pas un camp d’extermination, les conditions y sont extrêmes : plus de 56 000 internés y trouveront la mort. 

Le camp se caractérise par ses prisonniers politiques, communistes pour la plupart, qui mettront sur pied un fort mouvement de résistance : « le Comité clandestin international ». Parmi ses principales actions : la mise en place de kommandos de renseignements pour savoir ce qu’il se passe à l’extérieur du camp, le sabotage de la production d’armements et la contrebande d’armes au sein du camp. Mais surtout, sauver les enfants de Buchenwald, juifs pour la plupart - ce qui vaudra à certains résistants d'être plus tard reconnus Juste parmi les Nations par Yad Vashem.

Les premiers enfants et adolescents arrivent à Buchenwald fin 1938, après des actions contre les Tziganes ou les Juifs. Puis, ils affluent d'Europe de l'Est et de Russie, au gré des déportations. 

En dépit de leur jeune âge, les enfants de Buchenwald sont soumis aux travaux forcés et servent de main-d'œuvre dans les kommandos satellites du camp. Walter Barel, le président du Comité clandestin international, se souvient :  

« Les enfants doivent se lever comme nous à 5 heures du matin et rester debout sur la place d'appel par temps de neige ou sous la pluie dans le vent glacé et par grand froid ». 

Les Blocs 8 et 66


Pour les SS, les jeunes détenus ne constituent que des bouches inutiles qui reçoivent des rations alimentaires réduites. Le Comité de résistance propose alors de les rassembler dans un bloc à part, officiellement pour leur « apprendre l'ordre et la discipline germaniques ». Officieusement, la résistance veut éviter qu'ils soient éparpillés dans des baraquements, parfois au contact de criminels, et ainsi les protéger.

Le Bloc 8 est alors créé, dans un ancien bloc d'isolation excentré pour les malades du typhus, qui n'est donc pas soumis aux appels, particulièrement éprouvants. La résistance s'organise pour prodiguer aux jeunes vêtements chauds, chaussures, rations de soupe supplémentaires. Elle tente aussi de les affecter à des travaux moins pénibles comme la laverie ou la cuisine. La solidarité est sans frontière : les prisonniers français partagent avec les plus jeunes leurs colis reçus de la Croix-Rouge. Progressivement, les enfants apprennent aussi les règles du camp qui vont leur permettre d'éviter les foudres des Allemands.

En janvier 1945, avec l'avancée de l'Armée rouge et la libération des camps de l'Est comme Auschwitz ou Majdanek, arrivent alors à Buchenwald des jeunes de 7 à 20 ans, originaires d'Europe orientale, passés par les ghettos, les camps de travail et d'extermination et d'inhumaines Marches de la mort.

Ils sont rassemblés dans le Bloc 66. Là, 800 enfants bénéficient des mêmes rouages d'empathie et chaînes de solidarité qu'au Bloc 8 : plus de rations de soupes, partage des colis de la Croix-Rouge. Parmi eux : David Perlmutter né à Lodz en 1937 et Israël Meir Lau (Loulek), qui deviendra le Grand rabbin ashkénaze d'Israël, tout juste âgés de 8 ans.

Quand, le 11 avril 1945, le drapeau blanc est hissé dans le camp de Buchenwald, près d'un millier d'enfants est encore en vie.

La libération


A la libération, les jeunes rescapés sont affamés. Beaucoup n'ont pas mangé depuis 4 ou 5 jours. Leurs conditions physiques et mentales dépassent l'entendement.

Le commandant des troupes américaines, totalement démuni, câble un message aux bureaux de l'OSE à Genève :

« Avons trouvé un millier d'enfants juifs à Buchenwald. Prenez des mesures pour les évacuer sans délai. »

L'armée tente de prodiguer les premiers soins médicaux. Pour remplacer les pyjamas rayés, elle distribue des uniformes des Jeunesses hitlériennes, seul vêtement à la taille des jeunes corps. Côté nourriture, elle gave les enfants de sucreries. Dans les jours qui suivent la libération, beaucoup mourront de dysenterie ou de suralimentation.

L'OSE se voit confier la charge du groupe avec le soutien financier du Joint. Mais les discussions autour d'un rapatriement sont âpres et compliquées. Il faudra plus de 2 mois pour que la France accepte d'accueillir ces réfugiés étrangers. Finalement parmi ceux qu'il sera désormais coutume d'appeler les «Enfants de Buchenwald» : 280 malades partiront vers des sanatoriums en Suisse, 250 seront envoyés en Grande-Bretagne et 480 enfants seront rapatriés en France.